Le tissage moderne selon Petra Marciniak

Comment es-tu devenue créatrice ? Quel est ton parcours ? 

J’ai à la base une formation d’architecte de bâtiment que j’ai exercé pendant 15ans. Mais depuis environ 10 ans j’avais le sentiment d’un manque… J’ai travaillé comme architecte uniquement devant un ordinateur, un travail très abstrait, beaucoup de calculs. J’ai essayé plusieurs disciplines « créatives » avant de tomber sur le tissage : la peinture, le céramique, la couture, le tricot, le filage. Elles m’ont appris petit à petit plusieurs choses : j’adore travailler et créer avec mes mains, j’ai besoin de travailler avec des couleurs, des motifs, des matériaux et des fibres (les laines sont mes matériaux de prédilection).

Il y a 6 ans j’ai fait mon premier stage de tissage sur un grand métier à bras et j’ai été sûre d’avoir enfin trouvé « ma discipline ».

Comment te définis-tu en tant qu’artiste ? Parle-nous de ton univers

Mon univers est joyeux, coloré, graphique et moderne !

Je veux apporter à travers mes tissages la joie de vivre, la chaleur et la bienveillance dans la maison des gens.

Mais pas seulement. J’ai aussi une furieuse envie de montrer au monde que le tissage n’est ni vieillot, ni dépassé, ni médiéval, mais au contraire une technique moderne, artistique et magnifique !

Pour cela, j’essaie de trouver et de développer des techniques et des motifs plus contemporains que ce que l’on connait peut-être d’habitude en tissage. Toute est en fait une question de choix des couleurs, des motifs et des techniques, aucune technique d’artisanat n’est vieillotte par définition, la nouvelle vague des broderies modernes le montre assez bien je pense.

Je voudrais faire la même chose pour le tissage : Montrer que le tissage est un artisanat d’art moderne, qu’on peut même créer des vraies pièces d’art en tissage et que c’est un savoir-faire méconnu par la plupart des gens malheureusement encore.

Tu peux nous en dire davantage sur tes matières de prédilection et tes techniques de travail ?

Ma matière de prédilection est clairement la laine ou en général des fibres animales. La laine de mouton, le cashmere, le Yak, l’alpaga. Je travaille aussi avec le lin, le chanvre, le coton et la soie et j’aime toutes ces fibres, mais la pure laine est pour moi la matière la plus chaleureuse et réconfortante.

Au niveau des techniques je travaille avec des métiers à bras pour les tapis en Krokbragd et mes coussins, mais aussi avec des métiers à envergure, surtout pour le style Saori. Ces trois techniques : Krokbragd, Deflected Double Weave and Saori sont pour le moment mes techniques de prédilection.

De l’idée à la réalisation, tu nous expliques ton processus de création ? 

Échantillonner, échantillonner, échantillonner… Je ne fais que rarement des dessins, en général, quand j’ai une idée je mets une chaine étroite de 10-15 cm sur mon métier à tisser et j’essaie différents matériaux, pédalages, densités, couleurs etc. Je répète la même chose à la fin de chaque projet, il me reste normalement un peu de chaîne et je fais des essais. Souvent ces essais ne sont pas validés, c’est normal, mais échantillonner est le seul moyen en tissage de tester une idée.

Quelles sont tes principales sources d’inspiration ?

J’observe partout des associations couleurs et des motifs qui me touchent et qui sont un peu inattendus : sur Pinterest, Instagram, dans des magazines, des vêtements, dans la nature.

Parle-nous de tes projets à venir

Pour mes créations je prévois surtout de produire des pièces plus grandes, avec plus d’impact visuel et plus artistique. Par exemple des très grandes décorations murales, 2mx2m. Mais aussi des coussins beaucoup plus grands, 80x80cm par exemple, et des couvertures pour compléter ma gamme et des tapis plus grands.

Je prévois de m’orienter plus vers le travail avec des professionnels en 2022, de trouver des architectes intérieurs et des designers d’espaces pour travailler sur des projets d’aménagement concrets.

De l’autre côté je voudrais bien élargir le côté enseignement. Pour cela j’ai en projet de tourner un cours en ligne d’initiation de tissage sur métier à envergure, je prépare un cours de tissage végétal. Mon rêve est d’écrire aussi un livre sur le tissage avec le métier à envergure.

Qu’est-ce qui fait la particularité de tes créations ?

  • Mes techniques utilisées : J’utilise pour mes créations des techniques de tissage plutôt inconnues en France. Par exemple le « Krokbragd » pour mes tapis, une technique de tissage scandinave. Le « Deflected Double Weave » pour mes coussins, une technique de tissage anglophone et le « Saori » pour mes tableaux/décorations murales, une technique japonaise.
  • Mes couleurs : J’adore travailler avec des couleurs joyeuses, mélangées avec des couleurs naturelles et du blanc. Je suis quelqu’un de très positive et optimiste et je voudrais que mes créations transportent cette joie de vivre dans la maison des gens. Et pour moi cela passe par la couleur.
  • Mes motifs : Le tissage est normalement prédestiné pour des petits motifs répétitifs… je trouve que ces motifs sont en général trop « traditionnels » et connus. Je ne juge pas nécessaire de faire la même chose. J’essaie alors d’utiliser des techniques moins connues en France (comme décrit ci-dessus). De plus je suis constamment à la recherche de motifs plus graphiques et contemporains.

Quel objet insolite pourrait-on trouver dans ton atelier ?

Comme le tissage et les matériels de tissage ne sont pas très connus, je crois beaucoup pourraient être qualifiés comme « insolites ».

Petit défi : « 3 mots pour décrire ou définir tes créations »

Moderne, graphique, joyeuses

2 Replies to “Le tissage moderne selon Petra Marciniak”

  1. Bonsoir, Je viens de lire votre article. Je suis tout à fait d’accord avec vos propos. On ne parle pas assez du tissage. J’ai moi même un métier à envergure que j’ai acheté après avoir suivi 3 ou 4 stages auprès d’une tisserande sur Paris.
    Partie depuis 5 ans en Bretagne avec la création d’un atelier pour y pratiquer la couture, le tricot, la mosaique et bien d’autres techniques, je n’ai pas eu encore le courage de m’y remettre. Mon souhait avec le tissage était de fabriquer un tissage original pour ensuite créer des vêtements ou l’inclure dans la fabrication de sacs.
    J’attends avec impatience la sortie de votre livre pour me remettre au tissage.
    Armelle

    1. Marie-Laure Massieux dit : Répondre

      Merci pour votre agréable commentaire. Nous vous encourageons dans votre démarche ! Belle journée à vous.

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